Ce week-end, chaussez vos baskets : on vous emmène aux portes des calanques ! Direction les Goudes, petit village de pêcheurs. La balade vous conduira jusqu’à Callelongue que les Marseillais surnomment « le bout du monde ». Vous découvrirez des lieux qui comptent parmi les plus beaux paysages marseillais. Pourtant, les deux petits ports de pêche n’ont pas toujours eu cette allure de carte postale et l’histoire n’a pas toujours été tendre avec eux. Découvrez pourquoi.
Les Goudes
Notre balade débute aux Goudes. Un petit village de pêcheurs situé à l’extrême-sud de Marseille dans le 8e arrondissement de Marseille. On accède aux Goudes depuis le quartier de Madrague de Montredon par une petite route sinueuse qui offre des paysages à couper le souffle.
Devenu un lieu de prédilection des Marseillais comme des touristes, l’endroit est souvent surfréquenté dès l’arrivée des beaux jours. Les voitures sont toujours plus nombreuses à s’entasser le long de la route et provoquent la colère des riverains et du parc National des Calanques ! Pour vous rendre aux Goudes, privilégiez le bus ! La ligne de bus 20 au départ de Madrague de Montredon vous emmène à l’entrée des Goudes. Vous pouvez aussi prendre le temps de marcher le long du Chemin des Goudes : vous ne serez pas déçus ! L’entrée du village est signalée par un bateau installé sur le bord de la route.
Si le village des Goudes est aujourd’hui très prisé pour sa beauté et le dépaysement qu’il offre, cela n’a pas toujours été le cas. Vous connaissez sûrement l’expression marseillaise « va te jeter aux Goudes » utilisée pour demander à quelqu’un de débarrasser le plancher. Celle-ci fait référence à la Peste de 1720, époque où le petit port des Goudes était un lieu de quarantaine pour les bateaux touchés par la Peste.
Plus tard, entre le XIXe et le XXe siècle lorsque les calanques de Marseille sont devenues le lieu d’implantation de nombreux sites industriels, les Goudes n’ont pas échappé à la règle et deviennent à leur tour un site industriel. En 1804, une première usine est implantée tout au fond de l’anse des Goudes où se trouve actuellement le petit village de pêcheurs. En 1851, la plus grande usine française de plomb est construite au sein de la calanque de l’Escalette, située juste à l’entrée des Goudes. Les murs de l’usine à plomb existent toujours. La friche de l’Escalette est aujourd’hui installée dans les vestiges de l’ancienne usine. On peut se balader parmi les ruines du passé industriel du quartier tout en découvrant les œuvres de l’architecte parisien Jean Prouvé.
Ces usines servaient pour la production des savonneries et verreries. Elles étaient installées dans cette partie excentrée de Marseille car il y avait une faible densité de population. La direction du Mistral permettait de chasser la pollution loin du centre-ville. De plus, la production de plomb et de soude nécessitait un accès direct à la mer.
Le petit village actuel de pêcheurs avec ses cabanons atypiques a été construit dans les années 1930. Quelques pêcheurs s’y trouvent encore et on y croise de nombreux plongeurs ou des randonneurs prêts à s’engager sur les sentiers du massif des Calanques. Le lieu semble si paisible qu’il est difficile d’imaginer qu’une industrie lourde y a un jour été implanté.
Pendant l’occupation allemande, les Goudes sont également devenus un emplacement militaire et de nombreux bunkers ont été construits dans les massifs aux alentours. Ils sont encore visibles aujourd’hui.
Le cap Croisette
Depuis le port empruntez la rue Désiré Delaprat pour contourner le village. Suivez-la jusqu’au bout, vous arriverez face à la mer. La rue se termine ici mais un petit sentier de randonnée vous conduira jusqu’au cap Croisette. C’est une pointe située au bout d’une presqu’île rocheuse. Point de rencontre entre terre et mer, le cap Croisette se dresse juste en face de l’île Maïre. Selon la légende, le Cap Croisette serait le véritable lieu de fondation de Marseille. Si rien n’a été prouvé, ce qui est sûr en tout cas, c’est que le lieu est habité depuis la préhistoire : des traces des premiers hommes ont été retrouvées dans des grottes situées au-dessus des Goudes et de Callelongue.
Ce lieu tient son nom des petites croix qui ont été construites au fil du temps sur le massif rocheux. Elles honoraient les victimes des naufrages. Nombreux étaient les marins qui périssaient dans le cap Croisette à l’époque des bateaux à voiles. Le passage qui sépare le cap de l’île Maïre est particulièrement exigu : À certains, endroits seulement 70 mètres de large séparent la terre de l’île. Le passage est peu profond et les vents sont violents. Le couloir maritime était autrefois surveillé par la douane. Les ruines de leur bâtiment sont encore visibles sur l’île. La petite plage de sable qui s’y trouve se nomme la Baie des singes.
Les petites croix d’antan n’existent plus aujourd’hui mais elles ont été remplacées par une croix de béton qui commémore le naufrage du paquebot du Liban en 1903. Il s’occupait du service postal entre le continent et la Corse et venait de quitter le port de Marseille en direction de Bastia lorsqu’il entre en collision avec le paquebot l’Insulaire près de l’île Maïre. Le Liban sombre en moins de 20 minutes. Des opérations de secours sont organisées grâce aux barques de pêcheurs du port des Goudes mais c’est insuffisant pour sauver tous les passagers. On estime que 100 à 200 personnes ont perdu la vie dans ce naufrage. Ce naufrage reste la plus grande catastrophe maritime qu’ait connu la ville de Marseille.
Les vestiges du téléscaphe
Depuis le cap Croisette, faites chemin inverse pour retourner vers le port des Goudes. La rue Désiré Delaprat vous fait contourner les Goudes. Empruntez ensuite le boulevard Alexandre Delabre qui vous emmènera jusqu’à la calanque de Callelongue. Un peu avant le port, vous arriverez à hauteur des vestiges du téléscaphe. En contrebas de la route, des restes de roues et de poulies rouillées sont encore visibles. Voilà tout ce qui reste du téléscaphe : un projet délirant imaginé par l’ingénieur Denis Creissels et l’ancien champion du monde de ski James Couttet.
L’idée était simple : permettre aux Marseillais de vivre l’expérience du célèbre capitaine Némo en les immergeant au fond de la Méditerranée grâce à un téléphérique sous-marin reliant les Goudes à Callelongue. La traversée coûtait seulement 10 francs et plus de 30 000 Marseillais purent découvrir les fonds de la Méditerranée. Pour rajouter un peu d’intérêt au voyage, un bateau a même été coulé sur le parcours. L’inauguration qui a eu lieu en juin 1967 a été filmée aux tout début de la télévision régionale. Malheureusement un an après son inauguration, le téléscaphe ferme ses portes car il n’a pas réussi à trouver des investisseurs.
Pour en savoir un peu plus sur l’histoire du téléscaphe de Callelongue, le Tarpin Bien avait réalisé une vidéo il y a quelques années pour en raconter l’histoire :
Le port de Callelongue
Au bout du boulevard Alexandre Delabre, vous voilà arrivés dans la calanque de Callelongue. Ce n’est pas vraiment une calanque comme on l’imagine. Composée d’un petit port de pêche et de quelques habitations elle est moins naturelle que les autres calanques et constitue plutôt le point de départ pour se rendre dans les autres criques du massif. Une cinquantaine d’habitants y vivent à l’année. Il n’y a pas de plage dans cette calanque. L’accès à la mer se fait depuis les rochers.
Toutefois, comme les Goudes, Callelongue n’a pas toujours eu cette allure de carte postale. En 1849, le petit port de pêche est totalement transformé avec la construction de l’usine Weiss, une usine de traitement des produits chimiques. L’usine reste en activité jusqu’en 1884. Ensuite, les locaux sont réutilisés pour aménager des habitations ainsi que le restaurant la Grotte qui existe toujours aujourd’hui. Le restaurant est ainsi nommé en référence à la grotte de Saint-Michel où des ermites avaient fondé une grotte troglodyte au XVIe siècle.
Le port de Callelongue a inspiré de nombreux cinéastes et a servi plusieurs fois de décor pour des films tels que César de Marcel Pagnol tourné en 1936, L’Affaire du Grand Hôtel tourné en 1946 et réalisé par André Hugon, La Table-aux-crevés d’Henri Verneuil en 1951 ou, plus récemment, En Liberté ! réalisé par Pierre Salvadori en 2018.
Le sémaphore de Callelongue
Longez le port et empruntez le petit chemin qui vous mène en une vingtaine de minutes au sémaphore de Callelongue qui surplombe le port. C’est un ancien poste d’observation qui a été construit dans les années 1960 par Louis Jacob. Il se situe à 109 mètres au-dessus de la mer. L’intérieur du sémaphore était en très mauvais état il y a quelques années. Le Parc des Calanques a donc entrepris des travaux d’aménagement pour consolider l’édifice et en faire un lieu de découverte des paysages du Parc National des Calanques. En y montant vous bénéficierez d’un panorama époustouflant sur la mer, les calanques et le Cap Croisette.
Voici un petit aperçu de la vue que vous pourrez contempler depuis le sémaphore :
Ici se termine notre balade. Si vous ne souhaitez pas rejoindre Marseille à pied, vous pouvez emprunter la ligne de bus 20 depuis le port de Callelongue.