Vous avez sûrement entendu parler du cabanon dans une chanson de Fernandel ! Peut-être même pouvez-vous l’entendre affirmer « C’est le midi quoi ! C’est le cabanon » avec son accent chantant. En vous rendant en excursion dans les calanques vous avez sûrement déjà rêvé de passer une nuit dans ces jolies maisonettes colorées qui ont les pieds dans le sable ! Pourtant, les cabanons n’ont pas toujours été le petit paradis que vous connaissez actuellement ! C’était autrefois là que vivaient les Marseillais les plus pauvres ! Nous vous proposons de découvrir leur histoire
Je vous mets la jolie chanson de Fernandel en prime ! Profitez-en si vous ne la connaissiez pas 🙂
Les débuts du cabanon
Les plus anciens cabanons de Marseille datent probablement des années 1880. Au départ, le cabanon est une cabane de pêcheur. Il s’installe le long du littoral Marseillais, dans les massifs qui longent la mer et dans les calanques. Le cabanon sert d’abri pour entreposer les barques. Il permettait également aux pêcheurs de se replier en cas de tempête ou de forte chaleur. Sous l’Ancien Régime, les pêcheurs sont les seuls autorisés à bâtir ce genre de construction sur le littoral maritime.
Le cabanon est alors considéré comme un outil de travail. C’est également une habitation sommaire. Le plus souvent les pêcheurs partaient à l’aube au large des calanques (Sormiou, Sugiton ou encore les Goudes et Callelongue). Le cabanon leur permettait également d’être sur place la nuit avant ou de se reposer après leur sortie en mer avant de rentrer en ville. Dans la calanque de Morgiou, certains pêcheurs y ont même élu domicile à l’année ! On y trouve une grande pièce avec très peu d’équipement. Il n’y a ni eau ni électricité.
Des caravanes d’ânes venaient ensuite chercher le poisson qui avait été pêché pour le ramener en ville où il sera vendu. Ces mêmes ânes acheminaient de l’eau potable depuis la ville jusqu’aux calanques qui ne disposaient bien entendu d’aucune source d’eau potable.
La maison du pauvre
A cette époque, le cabanon est un peu considéré comme la maison du pauvre. C’est là que s’installent les Marseillais les plus pauvres avec leur famille. Au XVIIIe siècle, de nombreux pêcheurs catalans et italiens émigrent à Marseille. Ils disposent de peu de revenus et vivent donc dans leur cabanon. Au premier abord, ces pêcheurs pauvres qui s’installent en bord de mer peuvent vous sembler chanceux même s’ils disposent d’une habitation sommaire. Pourtant, habiter dans un cabanon se révèle plutôt dangereux. La plupart du temps, les pêcheurs construisent leurs cabanons sans permis de construire. Ils utilisent les matériaux qu’ils ont sous la main. Ces cabanes sont donc peu solides et insalubres. Je vous laisse imaginer les accidents qu’il pouvait y avoir l’hiver, lorsqu’il fait froid, que le Mistral souffle et que la mer est déchaînée…
Au XIXe siècle, l’industrie se développe à Marseille. C’est l’époque des grandes usines de plomb, de soude ou de soufre. Une industrie lourde dont l’exploitation se révèle particulièrement dangereuse pour l’Homme. Afin d’éviter que les Marseillais ne respirent les vapeurs toxiques, les usines sont installées à l’écart du centre-ville : dans les calanques. A cette époque, les ouvriers habitent non loin de leur usine dans des sortes de maisonnettes qui ressemblent plus ou moins aux cabanons des pêcheurs. Là encore le confort est bien loin d’être au rendez-vous. Ce sont des modes d’habitations qui coûtent peu chers à ces ouvriers. La plupart du temps, ce sont des émigrés qui ont peu de moyens.
Le cabanon devient un lieu de villégiature
Depuis le XVIIe siècle au moins, les Marseillais apprécient de se retrouver à la campagne. Dès qu’ils ont l’occasion de s’échapper un peu de la ville et de leur quotidien ils sautent sur l’occasion ! Ainsi, le cabanon devient un lieu de villégiature. Un lieu de villégiature, c’est un lieu où l’on se retire pour se reposer. On y passe un peu de bon temps en famille ou entres amis. A propos de la société de l’époque Horace Bertin, journaliste Marseillais réputé écrit dans son ouvrage Les heures Marseillaises :« L’été, la moitié de la ville part pour la campagne. À sept heures, négociants, courtiers, industriels, caissiers, teneurs de livres, ont habituellement terminé leur besogne et la plupart vont coucher à la bastide ou au cabanon. Ils reviennent le lendemain matin par les tramways ou les omnibus de huit heures, et c’est ce qu’ils appellent passer l’été à la campagne. »
La cabanon versus la bastide provencale
Il y a deux grands lieux de villégiature à Marseille.
Les élites bourgeoises apprécient de se rendre dans leur bastide. Ces propriétés étaient nombreuses et ont largement contribué à façonner le paysage des calanques et du littoral Marseillais. Elles sont un véritable témoin d’une architecture typiquement Marseillaise évoquant une époque particulièrement glorieuse de l’histoire de Marseille ! Les bastides étaient construites en retrait du centre-ville. Elles avaient une vue incroyable sur les collines de Marseille et la mer. Des jardins et des terres agricoles entourent souvent les bastides.
Souvent, elles étaient entourées de jardins et de terres agricoles.
Dès qu’ils en avaient l’occasion, les armateurs, négociants et autres élites de la ville s’y rendaient pour passer du bon temps en famille. Parmi les bastides les plus célèbres, nous retrouvons le château Borély, le château Pastré, la villa Valmer etc. Il y avait des dizaines d’autres bastides dans les collines autour de la ville ! Certaines ont aujourd’hui été détruites par les projets d’urbanisation et l’extension de la ville mais on en trouve encore beaucoup.
Les pêcheurs, les employés et les ouvriers Marseillais ont beaucoup moins d’argent. Ils n’ont donc pas le privilège de posséder une bastide. Au fil du temps, ils vont donc se créer leur propre lieu de villégiature : le cabanon provençal ! Le cabanon est à la sociabilité populaire ce que la bastide est à la sociabilité bourgeoise !
Un haut-lieu de la sociabilité masculine
Le cabanon, situé à l’écart de la vie quotidienne, devient un endroit propice au développement de la sociabilité. Dans un premier temps, au cabanon cette sociabilité est surtout masculine. Les pêcheurs, les ouvriers et petits employés de la ville apprécient de se faire “une virée au cabanon” comme ils aiment à le dire. Ils s’y rendent par dizaines. C’est un moment joyeux, un peu comme des vacances (rappelons que les congés payés n’existent pas encore). Ils y pratiquent une activité pour laquelle ils ont une passion commune : la chasse, la pêche, le jeu de cartes etc.
À l’inverse de la cellule familiale où la sobriété est souvent de mise, lors des virées au cabanon, la nourriture et le vin coulent à flot. Chacun est libre de parler comme il l’entend ! Au cabanon, contrairement à la maison, les hommes cuisinent ! Ils préparent des plats simples, riches et bien épicés qui font aujourd’hui partie intégrante de la cuisine Marseillaise : l’aïoli, la bouillabaisse ou encore la bourride.
Si vous voulez en apprendre plus sur le cabanon et la sociabilité masculine qui s’y déroule, je vous invite à consulter l’article d’Annie-Hélène Dufour à ce sujet.
Le cabanon devient un lieu de repos familial
À partir de 1920, les femmes commencent à venir au cabanon durant l’été ou durant les fêtes. En effet, entre-temps, les hommes qui venaient au cabanon se sont mariés. Chaque couple commence à prendre un cabanon individuel situé à proximité de celui des autres. L’entrée des femmes puis des enfants au cabanon change les habitudes. La présence des enfants nécessite d’améliorer les conditions de vie et d’hygiène des cabanons. Les familles aménagent les cabanons en petits foyers décorés sobrement.
L’année 1936 généralise les congés payés en France. Le cabanon devient officiellement un lieu de repos familial. Après la Seconde Guerre Mondiale, les Français ont besoin de pratiquer des activités récréatives. Les Marseillais viennent passer leurs vacances au cabanon et leur fréquentation augmente !
Les cabanons aujourd’hui
Avec le temps et le développement de la villégiature, les cabanons ont progressivement été réhabilités et agrandis. Au même titre que les bastides, les cabanons font aujourd’hui partie intégrante du patrimoine architectural, historique et culturel de la région provençale. On appelle cabanoniers les habitants permanents du Parc National des Calanques qui sont au nombre de 2 000 environ. Pour ceux qui aimeraient découvrir l’art de vivre à la provençale, cela risque malheureusement d’être compliqué ! Tous les cabanons se transmettent maintenant de génération en génération. Il n’y en a pas eu à la vente depuis longtemps ! De plus, en posséder un est une véritable chance car ils coûtent une petite fortune ! Certains propriétaires proposent parfois de louer leur cabanon. Qui sait vous aurez peut-être la chance d’y dormir une nuit un jour ?
Bonjour,
je realise la traversée des calanques du 20 au 22 octobre prochain, l auberge des Fontasse est complète, je cherche à passer une nuite dans un endroit qui serait sur le tracé des calanques ..
l idéal, le reve serait de pouvoir dormir dans un cabanon du coté de Morgiou voir S ormiou, j aurai juste besoin de dormir … je n ai pas des moyens importants …
si vous connaissez des gens qui auraient la possibilité de m herberger à un tarif honnête, je suis interessé