Cette semaine, partez à la découverte des abords du Palais Longchamp, le principal poumon vert du centre-ville dont l’histoire est étroitement liée à celle de l’arrivée de l’eau potable à Marseille !
On commence notre article avec une bonne nouvelle : le Palais Longchamp devrait prochainement être rénové pour retrouver le statut de Jardin Remarquable qu’il a perdu il y a quelques années. Un meilleur entretien des pelouses et des chemins, une sensibilisation des visiteurs à l’écologie et la création d’un jardin japonais sont au programme !
Le boulevard Longchamp
Notre promenade débute sur le cours Joseph Thierry, situé juste derrière l’église des Réformés. Remontez le boulevard Longchamp qui vous conduira jusqu’au parc du même nom. Le boulevard Longchamp est bâti par la ville à partir des années 1830. Très vite, ce boulevard devient un lieu très bourgeois où s’élèvent de luxueuses demeures et des hôtels particuliers. Il fut pendant longtemps un lieu privilégié à Marseille pour la bourgeoisie d’affaires avant de devenir un lieu apprécié par les compagnies de cinéma qui s’y implantent.
Côté architecture, les immeubles du boulevard Longchamp sont caractérisés par le style du trois fenêtres marseillais. Un style de construction qui débute au XVIIIe siècle et qui perdure jusqu’au XXe siècle. Le principe est simple : les façades des immeubles de ce style se composent de trois fenêtres sur chaque étage. Généralement, la façade mesure 7 mètres de large pour 14 mètres de profondeur. Les ornements sont plus ou moins présents au-dessus des portes d’entrée et dans l’encadrement des fenêtres en fonction de la richesse et de la volonté du commanditaire de l’immeuble. Parfois les immeubles du boulevard comportent 6 fenêtres ce qui signifie que le module des trois fenêtres a été doublé. La construction de ces immeubles est plus tardive que celle des trois fenêtres classiques. Le style des trois fenêtres a été très utilisé à Marseille et on le retrouve dans de nombreux quartiers du centre à l’exception du Vieux-Port où les immeubles sont soit trop anciens, soit trop récents.
Notez que Henry-Jacques Espérandieu célèbre architecte qui a entre autres réalisé le Palais Longchamp, la Bonne-Mère et la cathédrale de la Major a vécu au numéro 21 du boulevard Longchamp.
Le musée Grobet Labadié
Sur votre gauche, lorsque vous arriverez à hauteur du Palais Longchamp vous passerez devant le musée Grobet Labadié, qui était jadis la demeure de la famille Grobet Labadié, une très riche famille marseillaise.
Alexandre Labadié, un riche négociant en draps marseillais fut notamment nommé préfet des Bouches du Rhône pendant quelques semaines en 1870. Sa fille Marie Labadié se marie tour à tour avec Bruno Vayson, un notable et Louis Grobet, peintre et professeur de musique qui décèdent tour à tour en lui laissant une immense fortune. En octobre 1919, Marie Labadié fait don à la Ville de Marseille de la collection de sa famille ainsi que de son hôtel particulier boulevard Longchamp. Le musée est inauguré le 3 novembre 1925.
Le Palais Longchamp
Au bout du boulevard Longchamp, se dresse le Palais Longchamp. C’est sans-doute l’un des plus célèbres châteaux d’eau du monde car oui, ce célèbre monument Marseillais est avant tout un château d’eau. En 1835, une épidémie de choléra se répand dans toute la ville. C’est la conséquence du manque cruel d’eau que subissait la cité phocéenne à cette époque. L’ingénieur des Ponts et Chaussée Franz Mayor remet alors au goût du jour un projet datant du XVIe siècle : celui de construire un canal long de 85 kilomètres permettant d’acheminer l’eau de la Durance jusqu’à la ville de Marseille.
Il fallut 10 ans pour creuser le canal et pas moins de 18 aqueducs verront le jour pour acheminer l’eau jusqu’à Marseille. Henry-Jacques Espérandieu conçoit alors les plans d’un ensemble architectural monumental pour célébrer l’arrivée de l’eau dans la ville : Le Palais Lonchamp. Inauguré en 1869, le palais comporte plusieurs parties.
Au centre, le pavillon du château d’eau où était jadis stockée l’eau de la Durance. Le devant du château d’eau est décoré avec une fontaine colossale réalisée par Jules Cavelier. Il y représente un char qui semble émerger du château d’eau, tiré par 4 taureaux de Camargue. Trois personnages allégoriques féminins figurent sur ce char : au centre la figure de la Durance a le pied posé sur une amphore renversée, symbole de l’eau qui coule désormais à Marseille. De part et d’autres de la Durance deux figures féminines plus petites peuvent être assimilées aux divinités Cérès, déesse de l’agriculture et Pomone, déesse des fruits. Les deux divinités sont chacune accompagnées d’un enfant qui tient des gerbes de céréales pour l’un et des grappes de raisin pour l’autre. Tout dans cette œuvre symbolise l’abondance et la fertilité que l’eau potable apporte à Marseille.
Deux colonnades ouvertes s’étendent de part et d’autres du château d’eau et permettent de desservir les deux ailes du palais. Deux musées sont actuellement installés au sein du palais. Le musée des Beaux-Arts de Marseille se situe dans l’aile droite du palais. Son ouverture date de 1802, ce qui fait de lui le plus vieux musée de la ville.
Le muséum d’histoire naturelle se situe dans l’aile gauche du Palais. Il est classé Musée de France en 2002. Ses collections viennent de la ville ou de l’Etat.
Il est possible d’accéder aux colonnades par un grand escalier qui encadre le château d’eau. Prenez les pour accéder aux colonnades. Vous bénéficierez d’une superbe vue sur le centre-ville de Marseille et sur Notre-Dame de la Garde.
Le parc Longchamp
Il n’y a pas que le palais Longchamp qui mérite le détour. Le parc qui l’entoure est lui aussi remarquable et nécessite un coup d’œil. Le palais Longchamp est indissociable des jardins qui l’entourent et qui sont très fréquentés par les Marseillais. Trois jardins composent le parc.
Le jardin du Plateau est inauguré en 1869 en même temps que le Palais Longchamp. C’est un jardin à la française imaginé par Espérandieu. Le jardin de l’Observatoire, situé à l’arrière du Palais Longchamp est réalisé un peu plus tôt : entre 1863 et 1854. En vous y promenant, vous y découvrirez les bustes et statues d’hommes de lettres et d’art comme :
- Valère Bernard, un peintre et poète marseillais
- Adolphe Monticelli, un peintre marseillais qui fut l’une des inspirations de Van Gogh
- Alphonse de Lamartine, un poète et romancier français
- Frédéric Mistral, un écrivain provençal qui a contribué à défendre la langue provençale
- Ernest Reyer, un compositeur de musique.
Les vestiges du zoo
Le troisième jardin porte le nom de jardin Zoologique. Le palais Longchamp a jadis abrité un zoo, à l’arrière du palais. Pour vous rendre jusqu’au jardin Zoologique, il suffit de traverser le jardin de l’Observatoire, de descendre les marches et de vous rendre à l’arrière du parc. Le jardin Zoologique est inauguré en 1854. Le zoo est construit en 1856 et occupait une surface de 5 hectares. Il était séparé en deux parties que l’on pouvait rejoindre grâce à un petit pont qui passe au-dessus du boulevard Cassini. Les Marseillais pouvaient y contempler près de 2000 oiseaux et 1250 espèces de mammifères et reptiles. On y trouvait notamment des éléphants d’Asie, des fauves, des loups, des girafes, des hippopotames. À leur mort, les animaux allaient agrémenter les collections du muséum d’histoire naturelle. Les Marseillais y étaient très attachés et le « zoo de Marseille » est même devenu le sponsor officiel du maillot de l’OM pendant la saison 1980/1981. Le zoo fermera toutefois ses portes en 1987 en raison de problèmes financiers. Aujourd’hui, il est toujours possible de vous rendre dans le jardin zoologique. Les vraies cages qui y sont toujours datent probablement de l’année 1899. Vous pourrez y voir la cage des ours, des loups, des fauves ainsi que plusieurs volières. Elles sont appelées les fabriques et sont classées Monuments historiques.
Vous pouvez également admirer des bâtiments qui servaient d’abris pour les éléphants et les girafes. Ces bâtiments ont été conçus selon le style de leur pays d’origine.
Le projet Funny Zoo est créé en 2014 et permet d’installer dans les anciennes cages et pavillons des animaux colorés qui évoquent le passé de ce lieu.
Le pont Aqueduc de Longchamp
En bordure du jardin zoologique vous pourrez apercevoir le pont aqueduc de Longchamp, le dernier des ponts par lequel passe l’eau de la Durance avant d’arriver dans le réservoir du château d’eau. L’aqueduc s’étend sur une longueur de 238 mètres. Il se compose de 25 arches de 6 mètres 30 d’ouverture chacune. Bien-sûr, l’eau n’y coule plus depuis que le canal ne sert plus pour le service public et que les bassins du parc fonctionnent en boucle fermée. Toutefois, il reste tout comme le Palais Longchamp un vestige de l’arrivée de l’eau à Marseille, un évènement incontournable de l’histoire de la ville.
Le siphon d’eau
Depuis l’aqueduc, marchez quelque mètres jusqu’au bout du parc où se trouvent les dernières cages : celle des fauves. Tournez ensuite sur la gauche et empruntez le petit portail qui indique la sortie du parc. Vous remonterez l’allée principale d’un parking jusqu’à vous retrouver jusqu’à la rue Jeanne Jugan. Juste en face, vous pourrez contempler un majestueux bâtiment de briques. C’est le pavillon de partage des eaux, surnommé le siphon par les Marseillais. Il est construit entre 1899 et 1907 selon les plans de Baptistin Duce, un ingénieur du Canal de Marseille. Il est utilisé comme un siphon (d’où son surnom) pour améliorer la distribution des eaux dans Marseille. Il permettait notamment d’alimenter en eau les quartiers au nord de la gare, jusqu’à Sainte-Marthe ainsi que les locomotives à vapeur de la ligne Paris-Lyon-Marseille. Ce pavillon est classé Monument Historique depuis février 1998.