Ce week-end, prenez la direction du 16^e arrondissement de Marseille. Nous vous emmenons à la découverte du village de l’Estaque. Souvenez-vous, nous vous avions déjà fait découvrir ce village il y a quelque temps avec un itinéraire qui longeait en grande partie le littoral. Cette fois, nous vous emmenons prendre un peu de hauteur pour découvrir les secrets des hauteurs de l’Estaque et de ses collines ! Prenez vos vélos, cette escapade dans les collines c’est l’occasion de faire un peu de cyclisme en famille !

Le cinéma de l’Alhambra

Notre balade à l’Estaque débute rue du Cinéma, un peu avant l’entrée du quartier de l’Estaque. C’est ici que se trouve l’un des plus anciens cinémas de Marseille : l’Alhambra. Ce cinéma construit en 1928 possède encore aujourd’hui une façade caractéristique des établissements des années 30. L’Alhambra fonctionne jusqu’en 1980. Le cinéma demeure abandonné pendant une dizaine d’années avant d’être réhabilité une première fois en 1990.

L’Alhambra demeure aujourd’hui l’une des rares salles de cinéma Marseillaise classée Art et Essai. Ce cinéma dispose d’une salle de 232 fauteuils avec un écran de 12 mètres sur 7. Le bâtiment comporte également un hall d’accueil et un espace d’exposition. On y trouve également un espace de réalisation avec un studio de tournage, une salle de montage, une petite salle de projection ainsi qu’une salle MashUp.

En moyenne, 60 000 spectateurs fréquentent ce cinéma chaque année et assistent à 1200 séances de cinéma. L’Alhambra organise de nombreux évènements au cours de l’année : ciné-repas, ciné-concert, débats, festival Télérama etc.

La gare de l’Estaque

Depuis le cinéma de l’Alhambra, remontez l’avenue Rabelais sur la droite jusqu’aux hauteurs de l’Estaque. Après une dizaine de minutes de marche, tournez à droite sur l’avenue de Caronte pour arriver devant la gare de l’Estaque.

Le bâtiment principal de la gare se construit entre 1848 et 1851 à l’initiative de Paulin Talabot. C’est un ingénieur qui a fortement contribué au développement du chemin de fer en France. L’architecture de cette gare est remarquable pour ses abris construits à la fin des années 1920 dans un style Art Déco. Les abris métalliques et le passage souterrain datant de 1925 ont d’ailleurs permis d’inscrire la gare au titre des Monuments Historiques en 2012.

Au départ, cette gare devait uniquement servir aux transports de marchandises. Progressivement, elle devient une gare de voyageurs. Avant la construction de la gare, le village de l’Estaque alors simple hameau de pêcheurs était particulièrement isolé. L’arrivée du chemin de fer a profondément changé le quotidien des pêcheurs et des tuiliers installés dans le coin ! Grâce à sa gare, le village de l’Estaque connaît un fort développement industriel et démographique. Des usines et des logements ouvriers se développent dans ce secteur auparavant très rural. En parallèle de cela, un phénomène de villégiature commence à s’installer sur le littoral et contribue lui aussi au développement économique de l’Estaque.

En plus de cela, la gare de l’Estaque joue un rôle important dans le développement des activités marchandes de Marseille en particulier avec la création d’une ligne de chemin de fer la reliant à la Joliette et au nouveau port de Marseille en 1891 !

Le chaudron de l’Estaque

Depuis la gare de l’Estaque, nous allons faire un petit crochet vers le centre du village. Redescendez l’avenue de Caronte et engagez-vous sur la gauche sur la rue le Pelletier. Au bout d’un moment, la rue Le Pelletier devient le boulevard Roger Chieusse qui descend vers le littoral et que vous suivrez jusqu’au bout. À une centaine de mètres avant la mer, sur votre droite vous pourrez admirer le bâtiment du chaudron de l’Estaque.

Le chaudron de l’Estaque est un bâtiment du XIXe siècle qui comporte deux niveaux. C’était autrefois une teinturerie de filets de pêche appelée « chaudron de l’Estaque ». Les pêcheurs de la côte avaient beaucoup d’estime pour cet atelier. À cette époque, le rez-de-chaussée servait d’atelier et le 1^er étage accueillait le logement du gardien.

On y teignait les filets de pêcheurs, les voiles et les cordages qui avaient tendance à moisir dans les cales des bateaux à cause de l’humidité et de la chaleur. C’est le syndicat des pêcheurs de l’Estaque avec l’aide de la prud’homie des pêcheurs de Marseille qui crée cet atelier. Il remplace la pratique ancestrale de teinturerie réalisée dans les petits chaudrons de chaque pêcheur et qui était particulièrement dangereuse. Un « jour de la teinche » avait été décrété. Chaque semaine, les pêcheurs amenaient leurs filets à l’atelier pour les faire teindre.

Vous pouvez toujours lire l’inscription « Prud’homie de pêche-teinturerie » au-dessus de la porte d’entrée du bâtiment. Le bâtiment et ses installations intérieures figurent au titre aux Monuments Historiques le 19 mai 1998. Malheureusement le site est privé. Il n’est donc pas possible d’en visiter l’intérieur où se trouvent encore les anciennes cuves qui permettaient de faire le tannage du filet (on le traitait avec l’écorce de pin ou de chêne pour qu’il ne pourrisse plus).

La chapelle de la Galline et le hameau de la Nerthe

Après cette petite excursion jusqu’au centre de l’Estaque, nous allons regagner les hauteurs du village pour partir à la découverte des collines de l’Estaque aussi appelée « chaîne de la Nerthe » car c’est dans ces collines qui séparent l’étang de Berre de la mer que se trouve le petit hameau de la Nerthe. Nous allons d’abord faire étape à la chapelle de la Galline située à deux pas du hameau. Remontez le boulevard Chieusse, prenez à gauche sur la traverse Fabre puis suivez le chemin de la Nerthe jusqu’à la chapelle. Vous bénéficierez au passage de très jolies vues sur l’Estaque avant de vous engager plus en profondeur dans la colline. La balade dure environ 20 minutes.

La chapelle de la Galline se situe à l’entrée du hameau de la Nerthe. La chapelle et les quelques maisons qui l’entourent constituent l’unique vestige de l’ancien village de la Nerthe.

Selon la légende, cette chapelle qui était autrefois l’église paroissiale du village aurait été construite par Saint-Lazare ou par deux ermites au IVe siècle dans les premières années de la chrétienté. La chapelle actuelle remplace l’ancienne au Moyen-Age. Le 3 mars 1042, l’évêque Pons II de Marseille consacre la chapelle.

En 1430, une petite statue de la Vierge à l’enfant s’installe dans la chapelle. Jésus, dans les bras de sa mère porte une petite poule symbole de protection. Un symbole qui prend tout son sens dans ces lieux particulièrement dangereux. À l’époque, la route du littoral n’existe pas. Pour se rendre du quartier de Saint-Louis au Rove, il faut emprunter une petite route à travers les collines qui passait par la Nerthe et par un vallon surnommé Vallon de l’Assassin… La statue donne son nom à la chapelle, gallina signifiant poule en latin.

Les légendes veulent que ce soit grâce à la protection de la galline qu’il n’y a eu aucune victime de la Peste en 1720 ni à la Nerthe, ni à l’Estaque ni même aux Riaux. De nombreux ex-voto y décorent l’église les siècles suivants. La chapelle s’agrandit au XVIIIe siècle. La chapelle était également un lieu de pèlerinage. La statue était portée en procession à l’issue de laquelle les habitants priaient Marie pour que la pluie tombe ! En 1940, ce pèlerinage rassemble 4000 personnes. Encore pratiqué de nos jours le pèlerinage a lieu le 8 septembre, jour de la Nativité de la Vierge. Le village ayant pratiquement disparu après la Révolution, la chapelle de la Galline est rattachée à la paroisse de Séon Saint-Henri.

Si vous regardez sur le promontoire rocheux qui domine la chapelle, vous apercevrez les vestiges d’un ancien château appelé « château de l’Air » qui défendait autrefois le passage.

Les ruines du domaine de Cossimont

Depuis la chapelle, continuez sur le chemin de la Nerthe pour traverser le hameau. Vous apercevrez des maisons plus récentes que celles qui demeurent près de l’église. À la sortie du village, face à l’entrée de la société ISDI Lafarge, prenez le petit chemin qui sillonne la colline sur votre gauche pour arriver jusqu’au domaine de Cossimont. Une fois arrivé à hauteur du domaine, vous pouvez le contempler de loin depuis la route. Si vous souhaitez vous approcher et aller jusqu’aux ruines c’est possible. Attention, le chemin, parsemé de cailloux est difficilement praticable à vélo surtout si vous ne disposez pas d’un VTT.

L’origine de ce domaine remonte au XVIIIe siècle. C’est sous l’impulsion du marquis de Marignane qu’un pavillon de chasse se construit sur les lieux. Il ne reste aujourd’hui aucune trace de ce pavillon. Les aménagements actuels datent plutôt du XXe siècle. Il aurait appartenu à Pierre Sacoman, fabricant de tuiles. C’est la Société Coloniale des Chaux et Ciments de Portland qui acquiert ensuite le domaine. Le directeur de cette société, André Lindenmeyer, aurait habité au domaine à l’époque. À cette époque, le domaine alimentait en fruits et légumes les ouvriers de la cimenterie.

L’ensemble bâti du domaine serait ensuite devenu une crèche pour les enfants des ouvriers. Pendant près de 25 ans les enfants des ouvriers de l’Estaque passaient leurs vacances dans ce domaine hors du commun. En 1980, le site n’est plus utilisé. La société Lafarge est désormais propriétaire du domaine ainsi que des usines de la société coloniale du quartier des Riaux. Lafarge ne peut pas assurer l’entretien du domaine qui coûte trop cher. La société fait donc détruire le domaine pour éviter de voir les squatteurs l’envahir…

Il est aujourd’hui possible de contempler les ruines d’un domaine agricole de grande ampleur. Depuis le domaine, vous pouvez également contempler les terres d’un des derniers chevriers du Rove, célèbres pour la Brousse !